Édition 2023

Le pouvoir des récits

Découvrez la rencontre dédiée au pouvoir des récits, autour de Xabi Molia (écrivain, scénariste, réalisateur), Luc Bronner (journaliste, directeur de la rédaction du Monde) et Cyril Dion (écrivain, réalisateur, militant écologiste). Cette discussion est modérée par Camille Etienne, militante et porte-parole du mouvement On Est Prêt.

 

La conscience de la puissance des récits lui est venue à Cyril Dion du constat qu’il n’y avait pas de récits du futur, mais juste des critiques du récit actuel du capitalisme dans lequel nous vivons et qui n’est plus tenable. Pour lui, on ne peut pas convaincre les gens, les rallier sans leur montrer concrètement vers où aller, ce que les récits peuvent imaginer, c’est ce qu’il a essayé de faire avec Demain, en partant du réel pour faire un  récit inspirant du futur. Raconter des histoires, c’est notre façon d’être au monde, à nous les humains, le récit est de manière générale fondamental pour l’homme.

Xabi Molia lui, ne croyait pas pendant longtemps à la puissance des récits, ayant grandi dans un monde où certains récits comme le capitalisme étaient si puissants qu’ils étaient devenus un état de nature. Dans ce monde il y avait notamment une opposition entre réel et imaginaire très gênante pour un auteur, raconter des histoires avait peu de valeur et était considéré comme hors du monde là où lui voulait parler du monde. Les récits étaient moins nombreux aussi avec la baisse de lecteurs et la crise des journaux. Aujourd’hui on a une émergence de récits sur les réseaux sociaux, parfois malveillants, les fake news, qui mène à une époque de guerre de récits.

Pour Luc Bronner, face à la complexité de ce monde et de ses récits divers, la réponse que les journaux doivent apporter est une spécialisation des journalistes, pour échapper au piège du bruit médiatique permanent comme celui des chaines d’infos, que ces journalistes soient assez spécialisés pour être capables de dialoguer avec des spécialistes des glaciers, du Sars-CoV-2… Combiné à cette spécialisation, il fut donner la parole aux experts, aux écrivains, aux réalisateurs, à ceux qui connaissent leurs récits. L’information est très fragmentée, même en soignant les contenus des articles, il est difficile de lutter contre la marée des fake news apparaissant tous les jours.

Cyril Dion se demande comment rester alors un point d’ancrage, un espace où l’information est juste, sourcée. La première priorité du Monde est de s’adresser à gens voulant lire des avis divergents, confronter les points de vue. Pour Luc Bronner il s’agit des règles élémentaires du journalisme : donner de la place à la contradiction, à une forme de complexité, pour participer à la création d’un débat public. On ne peut pas être sur tous les fronts, et certains sont trop aveuglés par certaines constructions idéologiques, ce n’est pas à eux que les journaux s’adressent car rien ne les fera changer d’avis, mais ils limitent l’effet de contamination en donnant des armes aux lecteurs contre des récits mensongers. C’est là que réside la puissance des récits : l’humain n’est pas rationnel, il ne suffit pas de lui donner des informations, des preuves pour résoudre les problèmes, on est sans cesse entrainés par nos émotions, notre subjectivité, nos croyances… On peut alors jouer avec les récits pour faire des problèmes écologiques des sujets qui touchent cette subjectivité, qui traverse nos récits individuels en nous émouvant pour faire changer concrètement les choses.

 

 

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